
IA Act & RGPD : le cadre clair pour utiliser l’IA en assurance
- Rédigé par PhiloPartners
- Catégorie Conformité & Société
- Date 22 septembre 2025
L’intelligence artificielle s’invite partout : tarification, anti-fraude, gestion des sinistres, relation client.
L’assurance n’échappe pas à la vague. Mais là où certains voient seulement une opportunité, les régulateurs rappellent une évidence : plus l’IA touche aux décisions qui engagent un assuré, plus le risque est élevé.
Deux textes fixent aujourd’hui les bornes :
le RGPD, déjà bien connu, qui encadre toute donnée personnelle ;
l’IA Act, plus récent, qui classe les systèmes d’IA par niveaux de risques et impose des garanties techniques, documentaires et humaines.
En assurance, ces deux cadres ne s’additionnent pas : ils s’imbriquent. Autrement dit, impossible de respecter l’un sans tenir compte de l’autre.
Ce que l’IA Act demande, ce que le RGPD exige
Le RGPD part de la donnée :
dès qu’une information concerne une personne — client, assuré, salarié — il impose une finalité légitime, une base légale, la minimisation, la sécurité, et, pour les données sensibles (santé, origine, convictions), des garanties renforcées.
L’IA Act part du système :
il qualifie chaque usage selon son niveau de risque. En assurance, les usages qui influencent directement une décision client (admettre/refuser, tarifer, indemniser) relèvent du haut risque. Ce statut déclenche une cascade d’obligations : qualité et équité des données, documentation exhaustive, journalisation des traitements, supervision humaine, évaluations d’impact, suivi post-déploiement.
En résumé :
le RGPD sécurise la donnée,
l’IA Act sécurise le système.
Et dans l’assurance, l’un ne va pas sans l’autre : on ne peut protéger le client si l’on ne fiabilise pas l’outil, et l’outil le plus robuste ne vaut rien si les données qu’il manipule ne respectent pas le droit.
La ligne rouge : la nature des données
Tout se joue ici. Ce n’est pas l’outil en soi qui fait basculer un usage dans la zone rouge, mais la donnée qu’il manipule.
Données publiques ou génériques : veille réglementaire, notes de doctrine, analyses techniques non liées à un assuré. Elles peuvent transiter par des IA publiques — à condition qu’une relecture humaine ferme la boucle. Pas de pilotage aveugle.
Données clients, sinistres, santé, tarifs, modèles internes : aucune sortie possible vers une IA grand public. Ces données ne doivent circuler qu’à l’intérieur d’environnements privés ou d’entreprise, contractuellement encadrés (DPA), journalisés et supervisés.
Les raccourcis du type « anonymisation rapide » sont des faux-semblants. Dans l’assurance, la confidentialité n’est pas une option : le risque de ré-identification existe toujours. C’est une ligne rouge que l’on ne franchit pas.
Les cas d’usage typiques — sans ambiguïté
L’assurance est un terrain où chaque décision pèse lourd. C’est pourquoi la plupart des usages de l’IA tombent dans la catégorie « haut risque ».
Souscription et tarification : l’IA peut affiner une prime, mais jamais décider seule. Les modèles doivent être transparents, les biais mesurés, et le client doit toujours comprendre sur quoi repose la décision. L’explication est un droit.
Lutte anti-fraude : l’IA peut détecter des signaux faibles, mais le couperet reste humain. Sans validation humaine, le risque d’erreur se transforme vite en injustice.
Gestion des sinistres : automatiser un tri ou accélérer une instruction, oui. Refuser un sinistre sur seule base algorithmique, jamais. La traçabilité est ici la condition d’existence de la confiance.
Chatbots et relation client : rien de pire qu’un assuré qui découvre après coup qu’il a dialogué avec une machine. L’information doit être explicite, et la reprise par un conseiller humain immédiate si nécessaire.
Analytique interne : lorsqu’aucune décision client n’est en jeu, le risque baisse d’un cran. Mais dès qu’une donnée personnelle est utilisée, le RGPD reprend ses droits.
Le tableau de bord des usages : ce qui est permis, ce qui ne l’est pas
On peut écrire des pages entières de principes, mais parfois il faut une règle claire, posée sur la table.
Voici un tableau synthétique qui trace la ligne : 🟢 ce qui reste autorisé, 🟡 ce qui peut s’envisager à conditions strictes, 🔴 ce qui est formellement interdit.
| Fonction | Cas d’usage | Statut | Pourquoi |
|---|---|---|---|
| Gestion de sinistres | Rédiger une lettre de refus | 🔴 Interdit | Responsabilité contractuelle + risque de contenu erroné |
| Souscription | Rechercher des infos techniques publiques | 🟢 Autorisé | Pas de données client, usage documentaire |
| Actuariat | Demander un script Python générique | 🟡 Sous conditions | Pas de données internes, code revu par un expert |
| Juridique | Demander à l’IA d’analyser un contrat pour déceler des failles | 🔴 Interdit | Contrat confidentiel : violation du secret professionnel, risque d’erreur d’analyse |
| Marketing & Communication | Rédiger un post LinkedIn sur la prévention routière | 🟢 Autorisé | Sujet général basé sur données publiques. Relecture communication requise |
| Marketing & Communication | Créer une ébauche de script pour une vidéo publicitaire | 🟡 Sous conditions | Brief non confidentiel uniquement. Validation finale par direction marketing |
| Marketing & Communication | Générer des emails marketing personnalisés pour un segment de clients | 🔴 Interdit | Traitement de données personnelles interdit (RGPD). Risque de fuite et d’erreurs |
| RH | Évaluer un CV | 🔴 Interdit | Données personnelles + biais discriminatoires |
Ce qu’il faut mettre en place — simple, net, praticable
Se conformer à l’IA Act et au RGPD, c’est avant tout une question de méthode.
Un cadre de gouvernance pour décider, une transparence réelle vis-à-vis du client, et des équipes formées pour relire et challenger l’IA.
Ce n’est pas une « checklist » : c’est une organisation vivante qui associe juridique, technique et métiers autour d’une ligne claire.
Un plan en 90 jours pour se mettre en conformité
Nous proposons un accompagnement progressif qui permet, en trois mois, de :
- dresser l’inventaire des usages IA et qualifier les risques,
- poser un cadre interne clair (politiques, clauses, mentions),
- former les équipes et lancer les premiers contrôles sécurisés.
Le but : sortir des zones grises et garantir une innovation conforme, robuste, traçable.
La conformité IA en assurance est une méthode pour innover durablement.
C’est un cadre qui permet de prendre de meilleures décisions, de les expliquer, de les tracer et, in fine,
de protéger et renforcer la confiance de l’assuré.
IA Act et RGPD se complètent : l’un encadre le système, l’autre la donnée.
En maîtrisant ce duo, vous ne faites pas que gérer un risque réglementaire :
vous vous dotez d’un avantage concurrentiel basé sur la confiance et la robustesse.
Tenez la ligne, outillez-vous, formez vos équipes. Le reste est affaire de constance.
